L'entrevue : rencontre avec le jeune boxeur Elias Mahmoudi
- Reporteen
- 6 déc. 2017
- 7 min de lecture
Reporteen vous emmène aujourd'hui à la rencontre d'un jeune boxeur de talent, Elias Mahmoudi, que l'on décrit déjà comme l'espoir français de sa discipline, le Muay Thaï. Du haut de ses 19 ans, celui-ci nous dévoile son parcours pour le moins impressionnant, ainsi que ses projets ambitieux.
-Pourrais-tu te présenter en quelques mots ?
Je m'appelle Elias Mahmoudi, j'ai 19 ans, et je poursuis actuellement une carrière professionnelle de Muay Thaï, ou Boxe Thaï.
-Quand as-tu débuté la pratique de ce sport ? Quels sont tes premiers souvenirs ?
Alors ce sport je baigne dedans depuis tout petit ; je l'ai découvert grâce à mon père et mon oncle, Amar et Nordine Mahmoudi, passionnés d'arts martiaux depuis toujours, qui avaient déjà énormément d'expérience en la matière.
Je me rappelle courir dans la salle d'entraînement Mahmoudi Gym, celle du club fondé par mon père et mon oncle justement, et regarder tous ces jeunes s'entraîner avec admiration, avec toujours l'envie de reproduire leurs gestes. Je trouvais leur aisance assez incroyable.
- Quand as-tu compris que ce sport était fait pour toi ?
Mes coachs se sont aperçus depuis mon plus jeune âge que j'étais doué, et que j'avais certaines facilités à assimiler les différentes techniques de combat. Ils m'ont aidé à me perfectionner depuis tout petit, et ont compris que ça pouvait donner quelque chose.
Les choses se sont faites naturellement par la suite, parce que lorsqu'on a certaines aptitudes, mieux vaut ne pas les abandonner.
-Tu es né d'une mère française et d'un père d'origine algérienne, et es ainsi franco-algérien, mais, lors de tes combats, pour quelle nation joues-tu ?
Alors ça dépend, je peux parfois jouer pour l'Algérie, parfois pour la France, en fonction des combats que l'on me propose, car c'est très aléatoire, mais au final peu importe ; que je joue pour l'une ou l'autre, ça reste une fierté, je représente quelque chose qui me tient à cœur, je combats pour mon pays, et j'en suis toujours très heureux.
-Que ressens-tu en montant sur le ring ?
Alors c'est un sentiment assez partagé, parce qu'au tout début on ressent énormément d'adrénaline, pas vraiment de la crainte ou de la peur, mais plutôt une force qui nous aide à y aller, à se dire "Je vais le faire", et finalement, ce n'est pas une pression, mais plutôt un tremplin.
- Est-ce que tu as un rival ?
Je ne regarde pas vraiment la boxe, c'est pas quelque chose que je suis avec assiduité, donc je ne pourrais pas réellement dire que j'ai un "rival", je préfère me concentrer sur les combats que je dois effectuer.
-Parviens-tu à vivre de ce sport ?
C'est en grande partie difficile, car pour ce sport qui n'est que très peu médiatisé et suivi en France, on ne perçoit pas de grandes rémunérations ; ça dépend des combats que je peux faire et des prix que je peux gagner, mais c'est surtout grâce à un sponsors qui me suit depuis pas mal de temps que j'ai la chance d'en faire mon métier.
- Est-ce que tu aurais des conseils à donner à des jeunes qui, comme toi, voudraient se lancer dans une carrière dans le milieu sportif, tout en continuant à suivre leurs études ?
C'est le top pour moi, avoir la possibilité de suivre une section sport-études est un engagement formateur, une chance incroyable de pouvoir concilier les difficultés de la préparation et de l'entraînement et une certaine activité intellectuelle.
Je n'ai malheureusement pas eu cette chance, car il faut savoir que le Muay Thaï n'est absolument pas représenté en France, et poursuivre mon bac pro vente tout en m'engageant dans la boxe a été très dur : à certaines périodes de l'année, avec toutes les heures d'entraînement, j'avais même plus le temps d'aller en cours, parce que j'avais des combats beaucoup trop importants.
Toute l'année, le rythme était insoutenable : je me levais tôt le matin pour aller courir, pour après aller en cours, et plus tard je rentrais et enchaînais directement avec l'entraînement.
Pour me donner les chances d'obtenir mon bac, j'ai dû arrêter la boxe pendant sept mois, ce qui a été un énorme sacrifice, mais je n'avais pas le choix : des semaines de boulot, il fallait que je cravache pour l'avoir, et ça a fini par payer.
Une fois mon bac en poche, l'année dernière, j'ai ressenti un grand soulagement, j'ai dit "ouf, je vais enfin pouvoir me consacrer pleinement à la boxe". Donc les jeunes qui ont la chance de pouvoir poursuivre leurs études en se consacrant quasi pleinement à leur passion, je leur conseille de foncer, parce que c'est ce que j'aurais moi-même préféré faire.
- Est-ce que tu aurais des références en terme de boxeurs, ceux que tu suis en priorité ?
Alors la boxe ce n'est pas une passion à proprement parler, donc c'est pas quelque chose que je suis réellement, après en incontournable pour moi il y a Ramon Dekkers qui était vraiment talentueux, et en boxeurs belges que je suis il y a aussi les frères Boughanem, très impressionnants.
Je ne suis pas un adepte de la boxe en particulier, donc mes références restent ces 3 boxeurs de talent en priorité.
- Tu viens de dire que la boxe n'était pas une passion, mais alors quelles sont tes passions, et pourquoi pratiques-tu ce sport si ce n'est pas une passion ?
Ah la vraie question... (rires). Pour moi c'est le prolongement des choses, je suis bon, donc j'en ai fait mon travail, c'est un vrai métier ; dire que c'est une passion serait faux, parce que j'adore monter sur le ring, mais tout ce qu'il y a derrière est très dur ; quand je dois m'entraîner pendant des heures, perdre du poids, ou encore toutes les fois où je peux pas sortir, c'est pas quelque chose qui me plaît particulièrement.
Ce que j'aime vraiment, ce sont les reptiles, les serpents qui me passionnent, et aussi, ça se voit pas comme ça, fin les gens n'y pensent pas, mais j'adore pêcher, c'est ma vraie passion.
- Mais la boxe ne pose-t-elle pas justement des limites à tes passions ?
Bah si, c'est sûr que là par exemple je peux pas aller pêcher, après c'est la priorité, c'est un travail pour moi donc ça passe avant, je dois m'entraîner pour assurer à mes combats; c'est vrai qu'il y a des moments où c'est un frein, parce que quand j'ai des combats de prévus je dois penser à les préparer, et je peux pas me permettre d'aller passer des heures au bord d'un lac pour attendre de pêcher un poisson.
- Ton palmarès ?
J'ai été plusieurs fois champion de France, champion du monde junior ICO en Angleterre, j'ai eu la ceinture Siam Fight Junior à Phoenix, celle de champion d'Europe junior et ai été médaillé d'or aux championnats du monde IFMA à Istanbul.
J'ai également reçu d'autres titres, mais ça peut parfois être difficile, comme lorsque pour les championnats du Monde à Turin en Italie en Janvier dernier, j'ai remporté mon combat face à l'Espagnol Carlos Coello, mais étant donné que je pesais 200 grammes de trop, la partie adverse a contesté ma victoire, alors qu'elle avait au départ accepté de faire le combat en ayant connaissance de mon poids.
Les juges ont finalement rendu leur décision, et ont fait le choix de ne pas me remettre le titre, en expliquant que cette ceinture de champion du monde ne serait attribuée à personne, malgré les contestations du public et des commentateurs. C'était donc une sorte d'injustice assez difficile à digérer, mais la reconnaissance des professionnels a prouvé que je ne déméritais en rien.
-On te décrit actuellement comme le nouvel espoir français du Muay Thaï, étant donné ta remarquable progression observable tout au long de tes combats. Comment envisages-tu la célébrité que tu pourras ainsi certainement rencontrer dans les années à venir ?
La célébrité je la connais déjà en partie, principalement lorsque je me rends à des combats au Japon, car c'est un pays assez "fanatique", et j'ai pu y faire de très grosses prestations. Là-bas, la célébrité je suis donc en plein dedans, et c'est quelque chose que j'ai plutôt tendance à apprécier, c'est agréable, car bien que je ne fasse pas ce sport uniquement pour la recherche de celle-ci, étant donné tous les sacrifices que peut me demander l'entraînement, toute la sueur, tout ce que je traverse dans mon quotidien, c'est une sorte de reconnaissance du public qui me touche, ça me fait chaud au cœur, ça donne une force incroyable.
Même après ma prestation au Pitaya Muay Thaï Grand Prix, j'ai pu recevoir énormément de messages de Français sur ma page Facebook ou sur mon compte Instagram que certaines personnes sont parvenues à retrouver, des milliers de messages me disant que ce que je faisais était exceptionnel, ou même de certains parents qui me confiaient que j'étais un modèle pour leurs enfants, ce qui me fait extrêmement plaisir.
J'ai conscience que je ne deviendrai jamais un Neymar ou un Ronaldo, mais que les gens du milieu me reconnaissent représente déjà énormément pour moi.
-Qu'envisages-tu après ta carrière de boxeur ?
Pour l'instant, j'essaie de me mettre à fond dans le sport, pour voir jusqu'où je peux aller, et si demain je dois arrêter pour telle ou telle raison, je pourrais peut-être reprendre mes études, ou me diriger vers totalement autre chose, en fonction des projets qui s'offriront à moi.
-Et pourrais-tu te diriger vers un poste d'entraîneur par exemple ?
Pourquoi pas... Après, il faut savoir que boxeur et entraîneur sont deux choses totalement différentes, on peut être un très, très grand boxeur et zéro en entraîneur. Si j'arrive à transmettre mon savoir et mon expérience comme il faut, pourquoi pas... A voir.
-Le mot de la fin ?
Je tiens absolument à remercier tous mes fans, tous ceux qui me suivent depuis longtemps, ainsi que ceux qui sont "derrière", ceux que l'on ne voit pas, qui sont cachés ; mes parents qui m'apportent beaucoup de soutien, mon oncle aussi avec moi à l'entraînement... Je leur dois à tous énormément.

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