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L'entrevue : rencontre avec l'écrivaine Virginie Mouanda Kibindé

  • Anissa EL MRINI
  • 25 nov. 2017
  • 4 min de lecture

Reporteen vous propose aujourd'hui de découvrir, à travers cette entrevue, l'histoire émouvante de Virginie Mouanda Kibindé, écrivaine, qui retrace dans une importante partie de son oeuvre la mémoire d'un territoire dont elle est originaire, le Cabinda, laissé pour compte.

-Pouvez-vous nous dire en quelques mots qui vous êtes et nous raconter en quelques phrases votre parcours ? Virginie Mouanda, romancière et conteuse, je suis originaire du Cabinda et du Congo, en Afrique centrale. J’ai passé une partie de mon enfance à Nkoutkini, dans un petit village de réfugiés qui fuyaient la guerre du Cabinda. J'habite en France depuis 27 ans, je suis mariée, et j'ai trois grands enfants. En tant que conteuse, j'ai travaillé avec le Centre des Arts du Récit à Grenoble, et j'ai publié plusieurs livres avec différents éditeurs. Depuis peu, je dirige les éditions Wa'wa, en créant une collection de livres jeunesse et en mettant l'accent sur la mémoire, pour ce qui est de la littérature générale. -Qu'est-ce qui vous a poussé à écrire ? C'est un besoin de témoignage. Je voulais parler du Cabinda. Je voulais alerter l'opinion publique sur la condition des populations civiles qui vivaient terrées dans les forêts, sans qu'aucune ONG, aucun gouvernement ne se préoccupe de leur sort. Le Cabinda était en guerre depuis 1975, date des indépendances de toutes les colonies portugaises, l'occasion pour l'Angola d'envahir et d'annexer militairement ce territoire. -Votre histoire personnelle reste-t-elle votre source principale d'inspiration, ou cherchez-vous à dépasser celle-ci ?

Je me sers de mon expérience de vie, spécialement dans ma jeunesse pour raconter ce que j'observe ou ce que j'ai envie de défendre, mais je ne raconte pas spécialement ma vie. En effet , on retrouve un peu de mon enfance dans : « Au soleil noir du Cabinda ». Je raconte comment, avec ma grand-mère, on allait secourir les réfugiés ou les sortir de la forêt dans la nuit. Dans « Mémoire d'une colline », ce sont aussi les souvenirs de mon enfance avec ma grand-mère. Ma vie se retrouve par bribes en effet, par exemple avec mon dernier livre « Façon Aphrodite » où je parle de couples mixtes. D'une certaine manière, je ressemble de près ou de loin à chacune de ces Aphrodites. -Votre dernier livre justement, "Façon Aphrodite", a pour héroïnes 5 femmes dont les destins particuliers sont bercés par l'Amour sous ses formes plurielles. Que vouliez-vous ainsi dépeindre ? C'est juste pour dire que la vie nous réserve souvent des surprises. Et qu'on est parfois mené à composer, à s'adapter, voire déraper dans nos chemins de vie. Rien n'est écrit d'avance.

-Nous pouvons voir, à travers vos livres, que le Cabinda est un territoire qui vous est cher, notamment dans votre roman "Au soleil noir du Cabinda", et pourtant presque inconnu de tous. Quelle est l'histoire de ce "territoire", et pourquoi son existence est-elle passée sous silence ? Le Cabinda a été l'otage de la révolution des Oeillets au Portugal. Le Portugal, sorti appauvri par les longues années de guerres coloniales et de la dictature de Salazar, avait voulu conserver le Cabinda à travers l'Angola, avec qui ils signèrent des accords à Alvor. Au Cabinda, on exploitait déjà le pétrole depuis les années 50 par l'intermédiaire de multinationales Américaines. Ces revenus étaient versés au Portugal. Ils ne pouvaient pas lâcher la poule aux œufs d'or. Ce fut une aubaine aussi pour l'Angola de partager cette manne financière avec l'ancien colon, devenu ami sous couvert d'idéologie socialiste du nouveau pouvoir.

Dès lors, les puissances occidentales se servent des Africains comme tortionnaires de leurs semblables. Ils en avaient fini avec les guerres coloniales, pour autant l'Angola prenait le relais au Cabinda pour les intérêts portugais, alimentant dans le même temps la corruption et une autre guerre civile en Angola. Son existence était passée sous silence car malheureusement le destin du Cabinda était précurseur des drames de nombreuses régions d'Afrique aujourd'hui. C'est là que les multinationales des puissances occidentales s'entendent pour se bâtir d'énormes fortunes, piller en détruisant l'espace et les vies humaines. -Quelle est la situation actuelle au Cabinda ? La mémoire de la période sanglante de la fin du 20ème siècle et du début du 21ème siècle au Cabinda est-elle toujours douloureuse ? La période sanglante est passée, car la lutte armée a été anéantie par la puissance militaire angolaise. Restent les blessures et la désolation dans les zones désertées. Des espaces encore couverts de mines antipersonnel. Des familles entières ont été décimées, et la population vit toujours dans la crainte et la soumission. -Pensez-vous que l'écriture peut constituer un rempart à toutes ces formes d'injustices, ou bien qu'elle permet plutôt de garantir un devoir de mémoire après coup ? Nous sommes dans une situation de dominants-dominés. Comme ils sont forts, ils gagneront toujours, parce que le monde marche dans ce sens. C'est souvent la loi du plus fort qui domine. Et la justice sera toujours de leur côté. C'est par devoir de mémoire que j'écris. Pour ne pas oublier les victimes de ces injustices. Elles sont notre mémoire...


 
 
 

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